Vous vous apprêtez à déposer une proposition de loi sur la légitime défense. Pourquoi voulez-vous élargir cette notion ?
Je déposerai ce texte demain jeudi à l'Assemblée nationale. Que les choses soient claires : je ne veux pas changer l'esprit de la loi sur la légitime défense mais bien travailler sur la notion de légitime défense excessive, ainsi que sur la charge de la preuve.

Concrètement, que proposez-vous ?
Il y a plusieurs manières d'apprécier la légitime défense. En France, la personne qui riposte à une atteinte injustifiée doit répondre à trois critères : la riposte doit être nécessaire, proportionnée et simultanée. Fort de l'expérience du bijoutier niçois, mais aussi d'autres cas survenus récemment, je me suis penché sur les différentes législations européennes. En Suisse et en Allemagne par exemple, on prend en compte la violence de l'attaque et l'état de la victime avant sa riposte pour justifier la légitime défense excessive. Mon texte propose donc d'insérer un troisième alinéa à l'article 122-5 du code pénal : "N'est pas pénalement responsable la personne qui en repoussant une agression a excédé les limites de la légitime défense en raison d'un état excusable d'excitation, de désarroi, de crainte, de terreur ou de saisissement causé par l'agression".

Dans le cas du bijoutier niçois mis en examen pour homicide volontaire,la légitime défense n'a pas été retenue car il a tiré dans le dos de son agresseur en fuite...
Quand on vous a mis en joue avec un fusil à pompe en vous disant "la bourse ou la vie", vous n'êtes pas forcément à même d'avoir tous vos esprits au moment où vous réagissez ! Mais, dans le droit français aujourd'hui, on considère qu'une personne brutalisée, menacée de mort, est capable de discerner les 3 critères de légitime défense que je viens d'énoncer avant de riposter... Comme si elle avait été tranquillement assise dans un fauteuil et avait eu le temps de préméditer son acte. Nous savons tous que l'on a parfois un côté impulsif produit par un effet de frayeur. Les droits suisse et allemand prennent en compte cela. Et il me semble que ce sont des démocraties !

Êtes-vous certain que là-bas, le bijoutier niçois aurait pu bénéficier de cette circonstance atténuante ?
J'ai pris la référence du bijoutier niçois mais je pourrais en prendre d'autres. Je ne dis pas que la réforme que je propose pourrait s'appliquer à ce cas. Sur cette affaire, ce sera à la justice, si elle dispose de cette évolution du texte, de l'évaluer.

Ne peut-on craindre qu'une telle évolution ne conduise à une montée des actes d'autodéfense à l'américaine, avec des agressés qui se feraient justice eux-mêmes ?
D'abord, je tiens à rappeler que je suis pour une violence légale et légitime exercée par l'Etat. La question n'est pas de légitimer l'auto défense mais bien de prendre en compte dans le droit français la légitime défense excessive. Avec la loi actuelle, l'agresseur sait qu'il n'y a quasiment aucune chance qu'il y ait une riposte. Par le pacte social, chaque citoyen délègue sa protection à l'Etat et pourtant, celui-ci n'est pas toujours en mesure de satisfaire à son obligation. Le principe de légitime défense permet alors aux citoyens de reprendre ponctuellement leur délégation et de riposter, même par la violence, à une agression injuste.

N'est-il pas précipité de vouloir légiférer juste après la survenue d'un fait divers ?
Justement, je pense qu'il faut tout mettre en œuvre pour éviter d'être à nouveau confronté à ce type de cas. Je ne voudrais pas que l'autodéfense, la volonté de se rendre justice soi-même se propage dans notre pays. Je ne veux pas ça pour mon pays. Plus vite nous enverrons des signes forts, et plus vite nous empêcherons cette propagation.

Quelles autres mesures préconisez-vous pour assurer la sécurité des commerçants ?
Il y a une deuxième disposition dans mon texte. Je souhaite un renversement de la charge de la preuve pour les attaques de commerçants. Aujourd'hui, dans le régime de droit commun, c'est à l'auteur de la riposte de prouver son état de légitime défense, sauf dans certains cas. Par exemple si un simple citoyen est attaqué à son domicile de nuit, il y a présomption de légitime défense : c'est au procureur de prouver qu'il n'y a pas légitime défense. Mais dans le cas d'un commerçant dont on défonce la porte avec la volonté de nuire, c'est à lui de le prouver. Je souhaite que ce qui est vrai pour un individu agressé à son domicile de nuit devienne vrai pour un commerçant dans sa boutique.

Quel accueil votre proposition de loi va-t-elle selon vous recevoir auprès de vos collègues de l'Assemblée ?
De nombreux députés UMP m'ont déjà fait savoir qu'ils la signeraient. Je pense qu'il y aura quasiment 180 co-signatures. Les socialistes, eux, vont sans doute s'y opposer. Peut-être pas si j'arrive à les convaincre. En tout cas, j'ouvre le débat.

La réforme pénale, contre laquelle vous êtes vent debout, a été examinée mercredi en conseil des ministres. Comment comptez-vous vous opposer à ce texte dans les mois à venir ?
Ma pétition contre le texte de loi en est déjà à 100 000 signatures. Je constate que le combat qu'on a engagé depuis cet été, ainsi que les face-à-face que j'ai eu avec madame Taubira, Ministre de la Justice, sur le sujet ont amené le gouvernement à faire évoluer le calendrier : le projet de loi devait être inscrit au calendrier de la rentrée parlementaire, il est reporté à début avril, juste après les élections municipales. La ficelle est très grosse pour ce texte dont personne ne veut. La politique pénale de Madame Taubira envoie des messages de laxisme aux délinquants. Après, il ne faut pas s'étonner qu'il y ait une montée de la violence et de la délinquance dans notre pays

La garde des Sceaux vous avait accusé de "mettre en danger l'Etat de droit" lorsque vous aviez tenu de tels propos à l'Assemblée...
C'est madame Taubira qui fait peser de lourdes menaces sur le pacte républicain. Pour moi, un Etat de droit, c'est celui qui garantit la sécurité comme première des libertés à chacun de nos concitoyens. Le gouvernement a décidé de ne pas ouvrir le débat avant les élections municipales. Moi, je vais l'ouvrir et le nourrir avant.

Blois : braquage à la boulangerie avenue Foch

LaBoulangerie avenue Foch boulangerie de l’avenue Foch à Blois a été la cible d’un braquage lundi soir. Curieusement, la Nouvelle République ne livre l’information que vendredi dans une brève à 19 h 08 dans la rubrique « dernière minute » sur son site Internet.

On y apprend qu’un individu a fait irruption dans la boulangerie et menacé la vendeuse avec une arme de poing, en présence de deux clients.
Dans la panique, a fait tomber le tiroir caisse au sol et il a préféré prendre la fuite et en rejoignant un complice qui l’attendait sur un scooter.
 La police enquête, mais cette nouvelle agression ne fait qu’ajouter au climat d’insécurité dans le quartier, conséquence directe du Plan de Rénovation Urbaine.
Les habitants de Cabochon, la Quinière et les Allées auront l’occasion de la dire lors des prochaines municipales.

INFOGRAPHIE - Victimes de près de 200 attaques à main armée depuis le début de l'année, les commerçants sont exaspérés et certains n'hésitent pas à s'armer pour se défendre et à transformer leur boutique en «bunker».


 

Cambriolés, braqués, séquestrés… Depuis quelques mois, les bijoutiers, joailliers, horlogers et orfèvres sont au bord de la crise de nerfs. Selon nos informations, ces commerçants très exposés ont été déjà la cible de 327 agressions en tous genres entre le 1er janvier et le 31 octobre dernier, dont 191 vols à main armée. Soit une moyenne d'environ un hold-up tous les deux jours! Un bilan statistique consolidé par les fédérations professionnelles et porté à la connaissance du Figaromet en évidence que ces attaques se sont soldées par un taux d'échec de 15,6 %.

Des voyous armés de fusils à pompe, de haches

«La nouvelle génération de braqueurs de bijouterie est composée de voyous peu aguerris et d'autant plus dangereux qu'ils montent sur des coups en fonction de l'opportunité du moment, sans préparation et avec fébrilité, rappelle Doron Lévy, consultant spécialisé dans la gestion des risques et auteur d'une étude sur le hold-up pour le CNRS. En cas de résistance, ils n'hésitent pas à employer la force, frappant et blessant, au risque d'en arriver à des fins tragiques…».

Face à des voyous armés de fusils à pompe, de haches, de masses ou encore de répliques d'armes de poing plus vraies que nature, les commerçants ont la tentation de réagir. Comme à Marseille où, le 29 octobre dernier, un bijoutier s'est jeté sur son assaillant qui venait de l'asperger au visage de lacrymogène. Après avoir écopé d'un vilain coup à la tête, le braqueur était reparti bredouille. Ce jour-là, assure un commissaire, une tragédie a été évitée de justesse.

Entraînements dans un club de tir

À Toulouse, Lyon ou encore Strasbourg, nombre de commerçants ne rechignent plus à s'armer pour se défendre. «Si les employés ont pour consigne de ne pas résister en cas d'agression, de plus en plus de patrons emploient la manière forte pour protéger leurs biens, constate Jacques Morel, ancien général de gendarmerie devenu référent sûreté de l'Union française de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et pierres précieuses (BJOP). Ils n'hésitent pas à employer toute la panoplie des armes non létales telles que les gaz incapacitants ou encore des armes électriques, quand ils ne font pas l'acquisition de pistolets ou de revolvers de calibre 9 mm.» Pour cela, certains formulent une demande en préfecture après s'être inscrits dans un club de tir, où ils sont contraints à quatre séances d'entraînement par an dans un stand. D'autres réclament des permis de «défense de domicile ou de commerce», qui leur sont accordés au compte-gouttes en fonction des risques courus, de leur casier judiciaire (qui doit être vierge) et après une visite médicale établissant leur stabilité psychologique.

«   Ce n'est parce que des professions sont exposées que l'on va transformer certaines régions en Far West  »

Ministère de l'Intérieur

«Ce n'est parce que des professions sont exposées que l'on va transformer certaines régions du territoire en Far West», tempère-t-on au ministère de l'Intérieur, où l'on garde en mémoire la calamiteuse affaire de ce bijoutier de Nice qui avait tué, en septembre dernier, l'un de ses deux assaillants âgé de 19 ans. Le tireur, qui ne détenait pas de permis de port d'arme, n'avait pas bénéficié de la légitime défense. «Cette affaire, comme celle de Sézanne, constitue un signal fort, observe Jacques Morel. Les malfaiteurs, toujours aiguillonnés par le prix de l'or, qui atteint un niveau très attractif, se rendent compte qu'ils ne peuvent plus débarquer dans les boutiques en toute impunité, sans risquer de se faire blesser ou de finir dans un cimetière…»

La sécurité absorbent 30 % du budget

Selon les experts de la sécurité, le meilleur moyen de lutter contre les agressions est d'éviter les intrusions en équipant les enseignes de «sécurités passives». C'est-à-dire en renforçant le blindage des vitrines, la vidéosurveillance et en installant des sas, des présentoirs escamotables ou encore des portes blindées équipées de gâches électriques. Désormais, ces parades absorbent 30 % du budget. Au risque de transformer des boutiques censées faire offrir du rêve en de repoussants bunkers. Pour éviter ce piège, les professionnels, qui animent des réseaux d'alertes par SMS avec les forces de l'ordre, expérimentent de nouveaux procédés tels que des vaporisateurs qui arrosent les agresseurs de microparticules fluorescentes que l'on peut révéler à l'ultraviolet, même plusieurs mois après. Mais le système, qui a notamment fait ses preuves en Seine-Saint-Denis, reste balbutiant.