Derville a ainsi déniché sur Gallica, le site de la Bibliothèque de France, plusieurs ouvrages traitant de rachats d'esclaves dans les villes de la côte méditerranéenne du nord de l'Afrique, et particulièrement à Alger, où régnait le Dey.

Les "Maures" comme on les nommait au XVIIe et XVIIIe siècles, pratiquaient comme nous et comme de très nombreux pays le commerce de l'être humain. L'extrait de la page Wikipédia consacrée à la Régence d'Alger nous donne quelques informations sur ce phénomène :

esclaves

Les caravaniers qui partent du Maroc vers l'Afrique alimentaient les marchés des villes du nord de la côte du nord du Maghreb, les esclaves étaient composés d'hommes et de femmes dans la régence d'Alger. Comme la régence de Tunis, le protectorat ottoman et État barbaresque qu'est la régence d'Alger, pratique l'esclavage des chrétiens. La situation des esclaves est bien connue pour la seule ville d'Alger, où elle a donné lieu à une abondante littérature. Capturés à l'occasion des opérations du corso (NDLR : attaques de navires de commerce et captures de villageois sur les côtes réciproques, entre chrétiens et musulmans), leur nombre a varié en fonction de la prospérité de cette activité. « Alger regorgeait de captifs au temps de Kayr al Din (Barberousse) à telle enseigne que celui-ci appréhendait leur révolte » (Fatima Guechi), et durant les XVIe et XVIIe siècles, ils sont plus de 25 000, atteignant à l'apogée, au milieu du XVIIe siècle, le nombre de 25 000 à 35 000 esclaves chrétiens, alors que la ville d'Alger compte alors 100 000 habitants libres.

Avec le déclin de la course, la chute est fulgurante : 2 000 esclaves à la fin du XVIIIe siècle, 400 en 1830. Ils sont de toutes nationalités, surtout européennes, donnant à la medina son aspect cosmopolite, et de toutes origines sociales. Les classes aisées donnent les esclaves de rançon, bien traités en raison de leur valeur marchande. Les esclaves de travail sont logés dans les bagnes et servent dans les galères, l'entretien et la fabrication des bateaux. Les femmes servent de domestiques ou exercent la prostitution pour le compte de leur maître. La chiourme sert trois ou quatre mois en mer, le reste du temps servant à quai ou dans les chantiers navals. Quelques-uns de ces esclaves bénéficient de revenus de la course, d'autres tiennent des tavernes ou des cabarets. La conversion à l'islam comme voie de libération fait beaucoup d'adeptes en leurs rangs, l'autre voie étant le rachat, organisé par des ordres religieux (Trinitaires, Ordre de la Merci…).

Le souvenir d'illustres captifs a été conservé, et certains d'entre eux ont laissé le témoignage de leur temps d'esclavage : Pierre Gilles, conservateur de la bibliothèque de François Ier, capturé en 1546, Cervantès, Diego de Haëdo ou encore Emanuel d'Aranda. Les ordres religieux de l'époque se sont donc mobilisés pour racheter ces esclaves auprès de leurs propriétaires et les rapatrier en France. Des ouvrages ont alors été publiés à l'époque pour raconter ces opérations de rachat, ouvrages dans lesquels on trouve ces très émouvantes listes d'esclaves, aux noms bien de chez nous.

marché esclaves

"L'Ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs", tome 1", par Paul Deslandres, édité en 1903, analyse l'action de cet ordre et décrit ce qui suit concernant les esclaves du Dey d'Alger :

Le prix variait d'ailleurs selon le rang présumé de l'esclave et aussi selon le pays où il était détenu. Ainsi, au Maroc, les esclaves coûtaient deux à trois fois plus cher qu'à Alger.
Le dey faisait trois catégories, selon les professions que les esclaves pouvaient exercer : minstrances, gens de main d'oeuvre (forgerons, tonneliers, charpentiers), caravaniers, qui portaient les fardeaux, et passebarres, les moins estimés de tous, qui charriaient des pierres à la mer pour construire le môle. (...)
Dans les fortes rançons, la famille devait intervenir pour. la plus grande part, mais il est impossible de savoir la contribution des religieux pour chaque rachat. (...) Au prix net s'ajoutaient des droits innombrables, dont l'énumération tiendrait une page; le principal était celui des portes fixé à 10 %. (...)

A mesure que les Trinitaires rachetaient les esclaves, ils les faisaient pourvoir de leur carte de franchise et recueillir dans quelque maison hospitalière, la plupart du temps celle du consul ; en 1720, leur rançon fut payée dans l'hôtel du plénipotentiaire Dusault. La négociation finie, les libérés étaient passés en revue par le dey; c'est à ce moment que les rédempteurs (NDLR : les membres de l'ordre religieux) ont le plus à redouter les insultes de la populace. Le navire est bien inspecté pour que l'on soit sûr qu'aucun esclave ne s'y est caché en contrebande. Après cette inspection, le gouvernail et les voiles sont rendus, et le bateau procuré par le consul peut partir.

Des captures d'écran de ces listes sont consultables sur le blog de Derville, mais on trouve également facilement sur Gallica les ouvrages dont elles sont issues. Si d'éventuels volontaires se manifestent pour relever les noms qui y figurent, nous avons créé un fil de discussion dans les forums de Geneanet pour qu'ils puissent s'organiser pour le dépouillement, à publier via les relevés collaboratifs de Geneanet (nous demander l'ouverture d'un accès si vous faites un tel travail).